La céramique High-Tech est employée en horlogerie depuis la fin des années 1980. Depuis peu pourtant, cette matière dotée de qualités incontestables connaît une véritable expansion dans les univers du luxe. Analyse d’une tendance appelée à encore évoluer.

Un petit rappel historique s’impose avant d’aborder les évolutions récentes de la céramique en horlogerie. Cette matière héritée des avancées technologiques liée à la conquête spatiale est en fait un oxyde de zirconium en poudre qui, moulé puis passé au four à haute température, se transforme en une matière pratiquement aussi dure que le saphir, un minéral légèrement plus tendre que le diamant.

Utilisée d’abord dans l’univers médical pour des prothèses, ce matériau a été testé en horlogerie à la toute fin des années 1980 par Iwc et Rado. Cette dernière maison dont le mot d’ordre est la robustesse s’est entichée de cette matière qui garantit aux boîtiers de rester pratiquement aussi neufs qu’au premier jour et s’en est fait une spécialité. Il a tout de même fallu attendre les années 2000 et l’arrivée de la montre Chanel J12 pour que ce matériau inerte gagne ses lettres de noblesse. Longtemps proposée en noir ou en blanc laiteux, la céramique high-tech est restée confinée aux univers mode et surtout féminins. La preuve : cette dernière maison propose cette année et pour la première fois sa fameuse J12 en 33 mm de diamètre animée par un calibre à remontage automatique de manufacture (cal. 12.2).
Seulement, avec la mise au point ces dernières années de nouveaux procédés de fabrication et d’une chimie des composants améliorée, de nombreuses marques se sont intéressées à ce produit. La manufacture Hublot s’est fait une spécialité des dérivés spéciaux pour ce matériau. On lui doit la mise au point du Magic Gold, un or qui, allié à une céramique poreuse sous haute pression, permet d’obtenir un or 18 carats d’une dureté incomparable.
La marque de Nyon s’est aussi fait une spécialité des oxydes de zirconium de couleur et propose depuis plusieurs années des collections de montres dans des teintes acidulées ou débridées que les amateurs de produits branchés apprécient au plus haut point. La dernière ligne Big Bang présentée à Watches and Wonders déclinée en quatre nuances monochrome animées par le calibre Unico V2 HUB 1280 et éditées chacune à 250 exemplaires est un exemple parmi d’autres de ce que cette marque est capable de mettre au point dans ses ateliers.
L’heure des primordiaux
Les adeptes de pièces horlogères taillées pour l’aventure mais attentifs à l’esthétique de leur garde-temps regardent depuis quelques années les montres intégrant de la céramique dans leur boîtier avec intérêt. L’augmentation des pièces et la capacité de revente étant liées à l’état général de l’instrument, il est évidemment impérieux de mettre toutes les chances de son côté pour garantir à sa montre de rester aussi belle qu’au premier jour. Les plus malins préfèreront retenir des pièces de sport dotées de lunettes en céramique parce cet élément de l’habillage, très exposé est aussi le plus souvent griffé lorsqu’il n’est pas réalisé dans ce matériau pratiquement inaltérable. Rado avec sa Captain Cook High Tech Ceramic Diver a trouvé la solution. La carrure de ce garde-temps est réalisée en céramique haute technologie plasma mate, son fond en titane et sa lunette tournante en acier durci associé à un insert en céramique.

On notera que Tudor -maison associée à la manufacture Rolex-, propose depuis quelques temps à peu près la même chose avec sa Black Bay Ceramic. La pièce en matériau composite, animée par un calibre automatique de manufacture visible par le fond saphir, s’équipe d’une lunette tournante en acier traité noir dur et insert en céramique.

On notera que Rolex, la maison mère de cette entité horlogère, n’a pas encore sauté le pas du tout céramique, mais pare de longue date maintenant ses modèles sports de lunettes dotées d’inserts en céramiques noires ou de couleurs, dont le rouge, une teinte très complexe à obtenir.

Autre marque ayant été parmi les premières à utiliser la céramique : IWC. Elle le rappelle d’ailleurs dans sa communication en soulignant qu’elle avait fabriqué des prototype de Da Vinci en céramique dès 1986, année de l’arrivée de cette matière dans le métier. Cette année, convaincu d’avoir trouvé avec la céramique le matériau idéal pour ses montres d’aventure, la manufacture suisse alémanique en habille ses Montres d’Aviateurs Chronographe Top Gun. On notera parmi les produits de 44,5 mm de diamètre équipés des calibres 69380 susceptibles de séduire les aventuriers : les modèles Lake Tahoe (version blanche) et Woodland (modèle vert kaki).
Elargir l’offre
On l’aura compris, la céramique d’aujourd’hui qu’il est possible d’usiner comme s’il s’agissait d’un matériau moins dur et à qui il est possible de donner des couleurs originales ou classiques élargit le champ des possibles des marques ayant une appétence particulière pour la technologie avancée. On pense à Ulysse Nardin qui en fait usage depuis quelques temps. La dernière Moonstruck en est habillée, mais également l’étonnante et incroyable Freak S, héritière futuriste d’une pièce qui, depuis 2001 –date de son lancement- compte au nombre des dix références ayant marqué la profession. Cette année, cette montre dotée d’un étonnant carrousel servi par deux balanciers en silicium allant l’amble est habillée d’un boîtier inspiré de la première Freak avec une construction mixant les matériaux comme la céramique, le titane et l’or.

Evidemment, ce n’est pas la seule maison à faire l’usage de ce matériau promis à un bel avenir. D’autres entités font appel à lui pour rendre leurs produits à la fois plus léger et plus résistants. Toutefois, il ne faut pas oublier que cet étonnant composé technique, s’il résiste très bien à l’abrasion, aime assez peu les chocs violents contre une surface dure. Ainsi, on retiendra qu’il sera toujours préférable de passer ces garde-temps durables dans des lieux où le sol n’est pas en marbre, en pierre ou en céramique. En tenant compte de cette seule contrainte, ces instruments seront capables d’accompagner leurs propriétaires leur vie durant sans souffrir des affres du temps. C’est plutôt un vrai plus pour un bijou dont on sait toute la charge émotionnelle qu’il concentre au fil du temps.