Présenter un plateau de fromages pour les fêtes peut vite s’avérer un casse tête. Pour ne pas commettre d’impair, Franck Renault, à la tête du Bistro-quai le restaurant de bistronomie incontournable du Port de Saint Laurent du Var, a gentiment accepté de nous aiguiller.
Il faut dire que ce jeune et dynamique quinquagénaire en connaît un rayon sur les plaisirs de la table et en particulier sur les fromages. En effet, cet originaire du Nord Est de la Bretagne et du Sud Est de la Normandie a d’abord fait ses armes au sein du groupe alimentaire Lactalis, avant de se mettre à son compte en 2001, en ouvrant plusieurs fromageries/caves à vin à Liffré, Rennes et Laval.
Franck Renault a l’amour du détail et tient à maîtriser l’ensemble de la chaîne, des achats à l’affinage (en créant même ses propres caves d’affinage). Cette activité met sur son chemin un homme exceptionnel, Yves Cremmer, figure incontournable à la tête du Marché des Fromagers de Rungis. Fervent défenseur et passionné du produits fermiers depuis plus de 25 ans, il a rassemblé la quintessence des producteurs fromagers. De cette relation de confiance nait une profonde amitié.
Les années passent et Franck Renault partage désormais avec ses hôtes au Bistro-quai, son amour des produits locaux de qualité et ses valeurs de générosité, d’authenticité et de partage. Voici donc ses suggestions pour le plateau de fromages idéal pour les fêtes de fin d’année.
Tout d’abord, l’important est de proposer du fromage de qualité, au lait cru et fermier bien évidemment. C’est fondamental. Mais ce n’est pas si simple. Il faut aussi s’intéresser à la provenance de ce lait cru fermier. Comment a t-il été refroidi car la réfrigération détruit les bonnes bactéries du lait ? Que mangent les vaches : foin ou herbage ? Des questions pointues, qui font toute la qualité d’un fromage digne de ce nom. La période a également tout son intérêt. En effet afin de pouvoir déguster un excellent fromage à Noël il faudra que ce dernier ait été fabriqué quelques jours avant pour une pate molle (ou quelques semaines dans le cas d’un Saint Nectaire), et 18 mois ou 30 mois avant pour une pate pressée cuite. Et ce afin que le lait récolté pour sa fabrication proviennent de vaches ayant profité de la richesse des pâturages d’été.
Un Mont d’Or
Cette pâte molle à croûte lavée saisonnière est fabriquée uniquement avec du lait d’hiver de vaches nourries au foin. Il est très lactique et fondant. Il se sert à la cuillère après avoir été débarrassé de sa croûte supérieure, aussi bien chaud que froid. Pour les valeurs sûres, partir sur le Mont d’Or de Michelin Fromager, fabriqué artisanalement au cœur du Haut Doubs, à partir du lait récolté directement à la ferme et non refroidi. Ce fromager qui se bat contre les fromages industriels a conservé un savoir faire traditionnel avec l’utilisation de cuves en cuivre ou encore de toiles de lin. Le Mont d’Or de la Fromagerie suisse Daniel Conod, dans la ville de Baulmes, est également le nec plus ultra de ce qui se fait en matière de Mont d’Or.
Un Comté
Cette pâte pressée cuite est un grand classique du plateau de fromage. Comme vu juste avant, il faut choisir un Comté de minimum 16 mois, ou alors de 30 ou même 42 mois. Afin d’être sûr de déguster un comté exceptionnel tournez-vous vers un fromage Marcel Petite à Granges Narboz. Un affineur très attaché aux traditions fromagères des montagnes du Jura qui affine lentement ses 35 crus, seuls Comtés de réservation. Il sélectionne les meilleurs fromages de 8 à 10 fruitières (comme l’excellente Chapelle du Huin) et les mène à minimum 16 mois d’affinage et jusqu’à 42 mois.
Un fromage de Chèvre
Méfiance sur les fromages de chèvre car la vraie saison de ces derniers est de mars à novembre avec un lait gras et goûteux sans que le troupeau soit désaisonnalisé. Si on veut un fromage de chèvre de qualité sur un plateau de fête, on n’oublie le chèvre frais. Mais un fromage acheté en octobre et affiné jusqu’à Noël se révèle certes différent en texture mais bien meilleur. On citera la Fromagerie Franck Perard dans l’Allier qui élève traditionnellement 130 chèvres qui profitent du riche pâturage. Un Grand Charolais de cette dernière acheté en octobre et amené au demi ¾ sec à Noël est absolument fabuleux et d’une délicatesse absolue.
Un Soumaintrain
On aurait pu citer l’Époisses malheureusement il n’existe plus qu’une ferme à fabriquer de l’Époisses fermier, la Ferme des Marronniers. Alors on va rester en Bourgogne mais on va partir sur un fromage magique, le Soumaintrain qui porte le nom d’une commune de l’Yonne. C’est un gros fromage au lait de vache et à la croûte lavée et ce dernier n’est pas frotté à l’alcool (comme l’Époisses) mais juste au saumure. Puis il est affiné un certain temps, minimum 21 jours. On part les yeux fermés sur un fromage de la Ferme Leclere qui propose un fromage tout simplement divin !
Deux pates molles un Pérail ou un Saint Félicien

Le Pérail est un brebis, fabriqué en Aveyron. Dans le département, la grande spécialité reste le Roquefort. Mais il n’existe plus qu’un fabricant artisanal de Roquefort, Yves Combes et son fils Vincent qui produisent le Vieux Berger. Mais le lactique Pérail est un petit palet de 2cm d’épaisseur très fondant et crémeux. La ferme du Vezous produit un superbe Pérail fermier au lait bio dans la plus grande tradition pastorale. Direction l’Isère, avec Le Saint Félicien, tendre cousin du célèbre Saint Marcelin qui a également toute sa place sur ce plateau de fêtes. Notamment celui de la Ferme Rochas à Quincieu qui produit des Saint Marcelin et des Saint Félicien au lait cru traité à chaud.
On laisse de coté les bries ou Brillat-Savarin à la truffe au autres. Un fromage se suffit à lui même.